Le droit de surélévation en copropriété offre de nouvelles perspectives pour valoriser un bien immobilier, mais sa mise en œuvre soulève de nombreux défis juridiques et pratiques. Décryptage des règles à connaître pour mener à bien un tel projet.
Les fondements juridiques du droit de surélévation
Le droit de surélévation trouve son origine dans l’article 3 de la loi du 10 juillet 1965 sur la copropriété. Ce texte prévoit que le droit de surélever un bâtiment appartient à la copropriété, sauf disposition contraire du règlement. Concrètement, cela signifie que la décision de surélever l’immeuble relève de l’assemblée générale des copropriétaires.
Toutefois, la loi ALUR de 2014 a introduit une exception notable. Désormais, le syndicat des copropriétaires peut céder ce droit à un tiers ou à un copropriétaire, ouvrant ainsi de nouvelles possibilités pour valoriser le patrimoine immobilier. Cette cession doit être approuvée à la majorité des deux tiers des voix de tous les copropriétaires.
Les étapes clés de la mise en œuvre
La réalisation d’un projet de surélévation nécessite de suivre un processus rigoureux. La première étape consiste à faire réaliser une étude de faisabilité technique par un architecte ou un bureau d’études. Cette analyse permettra de déterminer si la structure de l’immeuble peut supporter la surélévation envisagée.
Ensuite, il faut obtenir l’autorisation de l’assemblée générale des copropriétaires. La décision doit être prise à la majorité absolue des voix de tous les copropriétaires (article 26 de la loi de 1965). Si le projet implique une cession du droit de surélévation, la majorité requise est celle des deux tiers des voix.
Une fois l’accord obtenu, il est nécessaire de déposer une demande de permis de construire auprès de la mairie. Le dossier doit comprendre les plans détaillés du projet, une notice descriptive des travaux et l’accord de la copropriété.
Les enjeux financiers et fiscaux
La surélévation représente un investissement conséquent, mais peut s’avérer très rentable. Le coût moyen se situe entre 2000 et 3000 euros par mètre carré, selon la complexité du projet et la localisation de l’immeuble. Le financement peut être assuré par la copropriété elle-même, par un promoteur extérieur ou par un copropriétaire acquéreur du droit de surélévation.
Sur le plan fiscal, la cession du droit de surélévation est soumise aux droits d’enregistrement (5,09% ou 5,80% selon les départements) si elle est réalisée à titre onéreux. Pour le syndicat des copropriétaires, le produit de la vente n’est pas imposable à l’impôt sur les sociétés.
Les copropriétaires bénéficient quant à eux d’une exonération de la plus-value immobilière sur leur quote-part du prix de cession, à condition que le produit de la vente soit intégralement affecté à des travaux de rénovation énergétique ou d’accessibilité de l’immeuble.
Les potentiels conflits et leur résolution
La mise en œuvre d’un projet de surélévation peut susciter des tensions au sein de la copropriété. Certains copropriétaires peuvent s’opposer au projet pour des raisons esthétiques, de perte de vue ou de crainte de nuisances pendant les travaux.
Pour prévenir ces conflits, il est recommandé d’organiser des réunions d’information en amont de l’assemblée générale, afin d’expliquer les détails du projet et ses avantages pour la copropriété. La désignation d’un médiateur peut s’avérer utile pour faciliter le dialogue entre les différentes parties prenantes.
En cas de litige persistant, le tribunal judiciaire est compétent pour trancher les différends relatifs à la surélévation. Le juge peut notamment être saisi pour contester la régularité de la décision d’assemblée générale ou pour faire respecter les droits des copropriétaires lésés par le projet.
Les perspectives d’évolution du cadre juridique
Le droit de surélévation est appelé à évoluer dans les prochaines années, notamment sous l’impulsion des politiques de densification urbaine et de lutte contre l’étalement urbain. Des réflexions sont en cours pour simplifier les procédures et encourager ce type de projets, particulièrement dans les zones tendues.
Parmi les pistes envisagées figurent l’assouplissement des règles de majorité pour les décisions de surélévation, l’instauration d’un droit de préemption au profit des copropriétaires sur le droit de surélévation cédé à un tiers, ou encore la création d’incitations fiscales spécifiques pour les projets de surélévation intégrant une part de logements sociaux.
La mise en œuvre du droit de surélévation en copropriété constitue une opportunité intéressante de valorisation immobilière, mais requiert une maîtrise fine des aspects juridiques, techniques et financiers. Une préparation minutieuse et une communication transparente sont les clés du succès pour mener à bien ce type de projet complexe.