Dans un monde professionnel en constante évolution, la formation et la reconversion sont devenues des enjeux majeurs pour les salariés et les entreprises. Comprendre le cadre juridique qui les encadre est essentiel pour saisir les opportunités et sécuriser son parcours. Découvrez les dispositifs légaux, vos droits et les obligations des employeurs pour mener à bien votre projet professionnel.
Le droit à la formation professionnelle : un acquis fondamental
Le droit à la formation professionnelle est inscrit dans le Code du travail depuis la loi du 16 juillet 1971. Ce droit fondamental a été renforcé par de nombreuses réformes, dont la plus récente est la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel. Cette loi a profondément modifié le paysage de la formation professionnelle en France.
Selon l’article L6311-1 du Code du travail, « La formation professionnelle continue a pour objet de favoriser l’insertion ou la réinsertion professionnelle des travailleurs, de permettre leur maintien dans l’emploi, de favoriser le développement de leurs compétences et l’accès aux différents niveaux de la qualification professionnelle, de contribuer au développement économique et culturel, à la sécurisation des parcours professionnels et à leur promotion sociale. »
Ce cadre légal garantit à chaque salarié le droit de se former tout au long de sa vie professionnelle. Les employeurs ont l’obligation de contribuer au financement de la formation professionnelle et d’adapter les compétences de leurs salariés à l’évolution de leur poste de travail.
Le Compte Personnel de Formation (CPF) : un outil clé pour la formation
Le Compte Personnel de Formation (CPF) est l’un des dispositifs phares de la formation professionnelle en France. Créé par la loi du 5 mars 2014, il a été profondément remanié par la réforme de 2018. Le CPF permet à chaque actif de cumuler des droits à la formation tout au long de sa carrière, qu’il soit salarié ou demandeur d’emploi.
Depuis le 1er janvier 2019, le CPF est alimenté en euros et non plus en heures. Pour un salarié à temps plein ou à temps partiel, l’alimentation du compte se fait à hauteur de 500€ par an, dans la limite d’un plafond de 5000€. Pour les salariés peu qualifiés, ce montant est porté à 800€ par an, avec un plafond de 8000€.
Le CPF peut être utilisé pour financer une large gamme de formations certifiantes ou qualifiantes, inscrites au Répertoire National des Certifications Professionnelles (RNCP) ou au Répertoire Spécifique. Il peut s’agir de formations diplômantes, de bilans de compétences, de validations des acquis de l’expérience (VAE), ou encore de formations à la création d’entreprise.
Un avocat spécialisé en droit du travail, Me Dupont, souligne : « Le CPF est un outil puissant pour la reconversion professionnelle. Il permet aux salariés de prendre en main leur évolution professionnelle, indépendamment de leur employeur. »
Le projet de transition professionnelle : un dispositif pour la reconversion
Le projet de transition professionnelle, anciennement connu sous le nom de Congé Individuel de Formation (CIF), est un dispositif spécifiquement dédié à la reconversion professionnelle. Il permet à un salarié de suivre une formation certifiante, en vue de changer de métier ou de profession.
Pour bénéficier de ce dispositif, le salarié doit justifier d’une ancienneté minimale de 24 mois, consécutifs ou non, en qualité de salarié, dont 12 mois dans l’entreprise actuelle. La demande doit être adressée à l’employeur au moins 120 jours avant le début de la formation si celle-ci dure 6 mois ou plus, ou au moins 60 jours avant pour une formation de moins de 6 mois.
Le financement du projet de transition professionnelle est assuré par les Commissions Paritaires Interprofessionnelles Régionales (CPIR), appelées Transitions Pro. Ces commissions examinent la pertinence du projet et accordent ou non le financement.
Selon les statistiques de Transitions Pro, en 2020, 17 500 projets de transition professionnelle ont été financés, pour un montant total de 282 millions d’euros. Le taux de retour à l’emploi après une formation dans le cadre d’un projet de transition professionnelle est de 72% à 6 mois.
Le plan de développement des compétences : l’engagement de l’employeur
Le plan de développement des compétences remplace depuis 2019 l’ancien plan de formation. Il regroupe l’ensemble des actions de formation mises en place par l’employeur pour ses salariés. Ces actions peuvent viser l’adaptation au poste de travail, le maintien dans l’emploi ou le développement des compétences.
L’employeur a l’obligation d’assurer l’adaptation de ses salariés à leur poste de travail et de veiller au maintien de leur capacité à occuper un emploi. Cette obligation est inscrite dans l’article L6321-1 du Code du travail.
Les actions de formation prévues dans le plan de développement des compétences sont en principe réalisées sur le temps de travail et considérées comme du temps de travail effectif. Toutefois, sous certaines conditions, elles peuvent être suivies hors temps de travail, dans la limite de 30 heures par an et par salarié.
Me Martin, avocate spécialisée en droit social, précise : « Le plan de développement des compétences est un outil stratégique pour l’entreprise. Il doit être élaboré en tenant compte des objectifs de l’entreprise, mais aussi des aspirations des salariés. Le comité social et économique (CSE) doit être consulté sur ce plan. »
La validation des acquis de l’expérience (VAE) : faire reconnaître son expérience
La Validation des Acquis de l’Expérience (VAE) est un dispositif qui permet d’obtenir une certification professionnelle (diplôme, titre à finalité professionnelle ou certificat de qualification professionnelle) en faisant valider son expérience professionnelle ou bénévole.
Pour être éligible à la VAE, vous devez justifier d’au moins un an d’expérience en rapport direct avec la certification visée. Cette expérience peut être salariée, non salariée ou bénévole. La VAE est un droit inscrit dans le Code du travail (article L6411-1) et dans le Code de l’éducation (article L335-5).
Le processus de VAE comprend plusieurs étapes : la recevabilité de la demande, la constitution du dossier de validation, et le passage devant un jury. Le jury évalue si les compétences acquises correspondent à celles exigées par le référentiel de la certification visée.
En 2019, selon les chiffres du Ministère du Travail, 36 959 candidats ont obtenu une certification par la VAE, tous ministères certificateurs confondus. La VAE est un outil précieux pour la reconversion professionnelle, permettant de faire reconnaître officiellement des compétences acquises sur le terrain.
Les obligations de l’employeur en matière de formation
L’employeur a plusieurs obligations légales en matière de formation professionnelle. Outre l’obligation d’adaptation au poste de travail et de maintien de l’employabilité déjà mentionnée, il doit :
– Organiser l’entretien professionnel tous les deux ans pour chaque salarié. Cet entretien est destiné à évoquer les perspectives d’évolution professionnelle du salarié et les formations qui peuvent y contribuer.
– Réaliser un état des lieux récapitulatif du parcours professionnel du salarié tous les six ans. Cet état des lieux permet de vérifier que le salarié a bénéficié des entretiens professionnels et d’apprécier s’il a :
1. Suivi au moins une action de formation
2. Acquis des éléments de certification par la formation ou par une VAE
3. Bénéficié d’une progression salariale ou professionnelle
Si l’employeur n’a pas rempli ses obligations, il doit abonder le CPF du salarié à hauteur de 3000€ dans les entreprises d’au moins 50 salariés.
Me Durand, avocat en droit du travail, souligne : « Les obligations de l’employeur en matière de formation sont substantielles. Le non-respect de ces obligations peut entraîner des sanctions financières, mais aussi être qualifié de manquement à l’obligation de formation, ce qui peut avoir des conséquences en cas de licenciement. »
Les recours en cas de litige
En cas de litige concernant la formation professionnelle ou la reconversion, plusieurs voies de recours sont possibles :
– Pour les salariés du secteur privé, le Conseil de Prud’hommes est compétent pour traiter les litiges individuels liés au contrat de travail, y compris les questions de formation.
– Les litiges relatifs au CPF peuvent être portés devant la Commission Paritaire Interprofessionnelle Régionale (CPIR).
– Les recours concernant les décisions de Transitions Pro peuvent être adressés à la Commission de recours de Transitions Pro.
– En cas de discrimination dans l’accès à la formation, vous pouvez saisir le Défenseur des droits.
Il est recommandé de consulter un avocat spécialisé en droit du travail pour évaluer la meilleure stratégie à adopter en cas de litige.
Le cadre juridique de la formation professionnelle et de la reconversion en France offre de nombreuses opportunités aux salariés pour développer leurs compétences et évoluer professionnellement. La maîtrise de ces dispositifs est un atout majeur pour sécuriser son parcours professionnel et s’adapter aux évolutions du marché du travail. Que vous soyez salarié ou employeur, une bonne compréhension de vos droits et obligations en la matière est essentielle pour tirer le meilleur parti de ces dispositifs et contribuer à une gestion efficace des ressources humaines.